Août 2020 dans le Briançonnais

Suite à la crise sanitaire du printemps et à l’annulation de toutes les sorties en extérieur prévues entre avril et juin, mi-juin, le club propose d’organiser un rassemblement grimpe en falaise dans les Hautes-Alpes sur les 15 premiers jours d’Août. Très rapidement, une petite équipe d’une dizaine de grimpeurs intéressés et motivés se dégagent : c’était donc partie pour une bonne semaine de grimpe dans le briançonnais, entre Mont-Dauphin et Ailefroide, du granit au calcaire en passant par le quartzite, accompagné par un guide local.


Ils seront finalement 4 (JB, Bao, Clémence et Lucie) à débarquer à Gap le dimanche 2 aout au matin : direction Vallouise. Cette journée du dimanche est consacrée au repos dans le chalet trouvé pour la semaine. Le soir nous rejoignons Adrienne (déjà sur place en camping), et Hervé et faisons la rencontre de François, notre guide pour la semaine.

Le rendez-vous est pris pour le lendemain, direction la falaise de Mont-Dauphin, secteur Thotal Kheops et Premier de cordées. Bao et Adrienne apprennent/révisent la manip de haut de voie, pendant que le reste de la troupe essaient d’apprivoiser ce drôle de rocher qu’est le conglomérat, notamment dans le 6a très rési « 1er de corvée ». Une première journée de prise de marque qui se termine un peu plus tôt à cause de la pluie.

Le matin du mardi 4 sera consacré à la grande voie « Chaud Biz » à Ailefroide : 10° C à 7h, ça pique un peu ( !) mais quel beau voyage grimpesque ! Après une pause déjeuner bien méritée, nous finissons de vider les batteries sur quelques blocs.



Le mercredi, Thierry (alias Tigre de papier) nous rejoins pour 4 jours, voici son récit :


Mercredi 05/08 :

Je retrouve Bao (alias Barbie Bao ou encore Maman Bao) et Clémence (rebaptisée la puissance douillette ou encore la chipo végétale) qui m’accueillent chaleureusement dans notre chalet à Pelvoux mercredi matin. Pendant ce temps-là JB et Lucie sont partis à s’attaquer à des voies dures sur le site de Fessourier.

Adrienne nous retrouve depuis son camping à Ailefroide, et nous rejoignons le reste du groupe aux Vigneaux. Je fais connaissance de notre guide, François Lombard, alias Babard. Mais rien à voir avec l’éléphant : dans les métaphores animales, il faudrait plutôt chercher du côté des félins vue son agilité sur les voies !

Direction Casse de Prelles pour effectuer une séance de couenne, un vaste site en quartzite avec des secteurs très variés. Après 15 min de marche en plein soleil sur des pierriers, nous posons les cordes sur le secteur « Les Ressauts », avant que le soleil qui tape fort ne nous pompe trop d’énergie. Une trentaine de voies du 4 au 6B nous attendent, sur une hauteur max de 25m : parfait pour une entrée en matière. La roche présente de jolies fissures, c’est super agréable à grimper. Babar s’assure que je maitrise bien les manips pendant que d’autres cherchent des projets. JB a jeté son dévolu sur « Tout en tongues », une belle voie en 6A+.

Quel que soit notre niveau, François nous distille ses conseils personnalisés au fur et mesure de la séance ; tout le monde y trouve son compte.

En fin de journée nous décidons collectivement du programme du lendemain, et nous choisissons de faire une grande voie.


Jeudi 06/08 :

Notre guide décide de nous emmener au Pouit, un site idéal pour nous initier aux voies de plusieurs longueurs. Sur le parking, il nous briefe aux différentes manips. On s’entraine à tour de rôle à effectuer notre nœud de machard (ou nœud français on sait pas trop), enfin bref notre autobloquant, et à positionner le reverso pour descendre en rappel. Après avoir failli arracher sa galerie autour de laquelle il a passé la corde pour l’entrainement, on se dit qu’il est temps d’aller mettre tout ça en pratique pendant que la falaise est encore à l’ombre. Une courte marche d’approche nous emmène à la » Dalle à kaki » (pour l’étymologie de la couleur kaki vous demanderez à JB 😉), une voie de 80m sur un rocher en calcaire, un grand classique du coin (légèrement patinée, nous sommes prévenus).

Lucie et Clémence, qui ont déjà effectué une longue voie à Ailefroide la veille de mon arrivée, ayant préféré se reposer ce matin, nous effectuons 2 cordées : Bao et moi sur une cordée réversible, Adrienne, Babar et JB sur l’autre cordée « en flèche », avec JB en tête (c’est JB la flèche, vous avez l’image ?).

A chaque relais, Babard est présent pour vérifier nos manips. C’est bien rassurant, car à plus de 1300m d’altitude, avec l’enchainement des longueurs sur une voie de 80m, et le gaz qui augmente sous nos pieds, la notion d’engagement n’est pas tout à fait la même qu’à Ladoumègue !

Au bout de 3 longueurs dans le 5B en moyenne, et environ 60m de gaz sous nos pieds, il est l’heure de descendre en rappel avant que la falaise ne passe au soleil ; c’est la phase la plus technique. Quel bonheur de se laisser glisser dans le vide le long des cordes à double ! Après 2 rappels successifs nous mettons les pieds au sol.

Le midi nous piquons une tête dans le lac de la Roche-de-Rame puis nous déjeunons dans un restaurant très sympa où nous retrouvent Lucie et Clémence. Cette petite pause rafraichissante est parfaite pour recharger les batteries.

L’après-midi nous nous dirigeons vers Mont-Dauphin : des falaises surplombées par le fort du même nom. Nous arrivons sur le secteur Raph, où nous attendent des voies d’une quarantaine de mètres dans des cotations plutôt corsées. Le rocher est en conglomérat, un style indéfinissable fait de trous et de galets. Babard continue à nous prodiguer ses précieux conseils, tout en décontraction, et à nous motiver à partir en tête dans des voies dures. Lucie se dit qu’au pire il ira récupérer les dégaines, et se lance sur un 7A. Effectivement notre guide ira chercher les dégaines, et quand on le voit évoluer dans un 7A avec une facilité déconcertante, alors qu’il n’a pas pris assez de dégaines (pour nous apprendre à « dédramatiser certaines situations » ?!), ça laisse rêveur.

A 19h passées on se dit qu’il serait peut-être temps de libérer notre guide, qui est avec nous depuis 8h du mat, et on rentre tranquillement au chalet. Nous avons déjà jeté pas mal de forces dans la bataille, alors devant l’état des troupes, François nous propose une matinée de repos avant de reprendre de plus belle.


Vendredi 07/08 :

Vendredi matin nous profitons de notre matinée « quartier libre » pour vaquer à nos occupations, dans une ambiance colonie de vacances.

L’après-midi nous retournons à Casse de Prelles, pour une initiation à la grimpe en trad. Babard nous explique comment placer les coinceurs dans les failles que nous offre le rocher. Puis JB et moi mettons la théorie en pratique dans des voies déjà équipées : l’une d’entre elles est nommée « Où sont mes friends », ça semble parfait pour tenter l’expérience ! L’idée est de s’assurer sur des coinceurs dans des voies faciles, tout en passant quelques dégaines dans les spits existants par sécurité. A l’issue de notre 2ème voie en semi-trad dirons-nous, place au debrief : François vérifie nos coinceurs. La plupart sont « en parapluie », ou mal positionnés, l’un d’entre eux me reste même dans les mains sans aucune résistance quand je le retire. Le verdict est sans appel : en gros si nous n’avions eu que les coinceurs, et si nous avions chuté juste avant le relai, nous aurions eu une probabilité non négligeable que nos coinceurs ne tiennent pas et que nous fassions un retour au sol. Ce n’est pas donné à tout le monde le terrain d’aventure !

Nous échouons sur un autre secteur : le clos des merisiers. Un endroit très sympa, à l’ombre de surcroit, où les ouvreurs se sont lâchés sur les jeux de mots en rapport avec les cerises. Nous y travaillons des voies telles que « Guignol laid », « Clafoutis » ou « Bigarreau ». Tout le monde commence à être bien chaud et Babard nous pousse à sortir de notre zone de confort, à devenir des tigres selon son expression. En regardant la couverture du topo on réalise que c’est lui d’ailleurs sur la photo, tout juste un peu plus jeune. On peut préciser ici qu’il a été grimpeur professionnel pendant 10 ans, et même vainqueur de la coupe du monde en 1994. Autant vous dire que ça force le respect, et on réalise la chance qu’on a de pouvoir profiter de son expérience dans nos humbles niveaux.

Vendredi soir Hervé nous a chaleureusement invité à diner dans son tout nouveau chalet fraichement construit à Vallouise, et nous dégustons des grillades en racontant nos exploits.


Samedi 08/08 :

Samedi matin François nous emmène sur un site proche de l’Argentière la Bessée : le Rif d’Oriol. Il présente l’avantage d’être à l’ombre toute la journée, mais l’inconvénient d’être très fréquenté.

Nous arrivons les premiers sur le site, un canyon où le rocher a pris des formes très originales : nous sommes séduits ! Nous commençons à grimper dans une cheminée, cherchant des prises dans les cannelures si particulières que forme la roche. Les voies sont de toute beauté, notamment « Ici l’ombre » et le « prince du baquet » qui me laisseront un souvenir impérissable.

Bao, qui n’a pas fini de nous surprendre, continue à monter dans les cotations en trouvant naturellement des gestuelles improbables. Mais où va-t-elle chercher toute cette énergie ?

Malheureusement pendant ce temps-là des hordes de grimpeurs de toutes les nationalités déferlent dans l’étroit canyon, et les affaires s’entassent au pied des voies. Progressivement on doit jouer des coudes pour grimper, et on se sent épiés quand on escalade par ceux qui patientent au pied des voies. On se croirait à Murmur aux heures de pointe ! La compétition Tout à Bloc (TAB pour les intimes), dont la finale a lieu le soir même, a dû aussi attirer beaucoup de grimpeurs dans le coin, ce qui n’arrange rien à l’affluence habituelle. De jeunes mutant(e)s passent un 8A à tour de rôle : on prend une leçon d’humilité au milieu de tous ces grimpeurs de haut niveau, dont la plupart sont des compétiteurs.

Mais au bout d’un moment la foule ça devient franchement insupportable : on se dit que le site aurait pu être renommé le cluster d’Oriol pour reboucler avec l’actualité. Du coup nous décidons de prendre nos clics et nos clacs et d’aller déjeuner avant de migrer sur un autre site. Et dans le bazar général on ne retrouve même pas toutes nos dégaines !

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C’est après notre pause déjeuner que Thierry nous quitte pour de nouvelles aventures (le record de la piscine a-t-il été battu à 17h ?). Nous sommes tous bien entamés par cette riche semaine, mais nous voulons profiter jusqu’à la fin : François nous propose un site un peu plus confidentielle et pêchu pour finir notre semaine de collaboration dans une ambiance haute-altitude : la Grotte d’Oréac. La marche d’approche est pentue et un peu exposée, mais la vue, à 1800 m d’altitude, grandiose !!! Nous jetons notre dévolu sur la voie en 6c+ « Attention Vaudois ». JB et Clémence se lance en moulinette, quand Lucie fait un bel essai en tête allant quasi jusqu’au vol. Nous sentons tout de même que notre cartouchière émotionnelle s’est bien vidée les jours précédents… Il faudra revenir pour enchainer !

Pendant ce temps, Baptiste et Caroline sont arrivées au chalet. Nous décidons de se rejoindre au TAB pour profiter des finales et voir des grimpeurs internationaux dans des blocs grandioses. La fatigue accumulée aura raison de notre présence et nous décidons de rentrer au bout d’une heure de spectacle…

D’autant que le lendemain, dimanche, nous avons rendez-vous à 7H30 à Ailefroide avec Hervé pour faire une grande voie. Bao et Clémence décide de se reposer, tandis que nous partons en 2 cordées (JB, Hervé et Caro ; Baptiste et Lucie) grimper « Remonte-pente direct ».

Une belle manière de conclure cette semaine pour JB, Lucie et Bao, qui s’en retourne le soir même prendre le train de nuit pour Paris, et de passer le flambeau à Baptiste, Caro et Clémence qui restent quelques jours de plus pour profiter des possibilités offerts par cette belle région.


Des images compilées en vidéo par Bao ci-dessous